Léo Latil (1890-1915) was the poet for Pourquoi, pourquoi m’avez vous abandonné? (Why, why have you aboandoned me?)

Pourquoi, pourquoi m’avez vous abandonné? Il fait nuit et le grand vent de la fin de l’hiver souffle. Il siffle dans la cheminée et sous les portes, et m’entoure de froid. Dehors il doit secouer les arbres follement, s’élancer dans les rues, contournant les maisons, et bondir dans les campagnes au dessus des collines et des bruyères mortes. Pourquoi m’avez vous abandonné, mon amie? Les nuages d’un noir de suie mouvementés et soulevés, laissant voir le ciel d’un bleu nocturne, s’étendent au dessus des sombres campagnes. Et tout le ciel abaissé se meut sur la terre. Je vous aime avec mes larmes et je vous donne la douleur de mon coeur. Que m’importe, que vous m’ayez abandonné, ô trop heureuse, trop joyeuse et trop douce! Que m’importe… car si votre amour adoucissait mon coeur ce soir, je ne sentirais pas mon âme épouvantée emportée sur les ailes du vent dans les sombres campagnes.
Why, why have you abandoned me? It’s night, and a late-winter wind is raging. It’s blowing down the chimney and under the door, blanketing me with cold. Outside it’s shaking the trees, darting into the street, running around houses and bounding through the countryside over the hills and the dead heather. Why did you abandon me, Love? The soot-black clouds move and rise, giving glimpses of a midnight sky far above the somber fields. The lowered sky throws itself at the earth. I love you with my tears and I give you my heart’s pain. What it to me that you abandoned me, you who are too happy, too joyous, too sweet! What does it matter to me – for if your love softened my heart tonight, I would not feel my terrified soul swept off on the wings of the wind over the somber fields.

 

Folk poetry is the source of Chant de nourrice (Song of the Nurse)

Dors, ma fleur, mon fils chéri; pendant que je balancerai ton berceau, je vais te dire le conte de ta vie. Je commence par te prévenir que tu es un Hébreu, Que tu as Israël pour nom et que c’est là ton titre de noblesse. Ô mon chéri, quand tu seras avec des gens étrangers à ton peuple, ne sois pas honteux devant leurs insultes mais responds-leur bien haut. Oh! je te prie, sois sans peur aucune, dis leur: “Ne suis-je pas le descendant des saints, fils du peuple eternal?” Fils du peuple éternellement persécuté malheureux comme point d’autre, glorieux quand même, car il dure, et cela depuis des siècles et cela pour toujours. Ne désespère point, mon fils chéri parceque ton peuple est en exil. Crois plutôt que le soleil de la justice un jour brillera sur nous. Souviens-toi sans cesse que nous avons un pays, là-bas, très loin, que c’est vers lui que l’âme de tout juif aspire avec ardeur. Sur ses monts, dans ses champs délicieux tu deviendras ce que tu voudras: vigneron, berger, planteur, jardinier, tu vivras paisible…. Dors ma fleur, mon fils chéri.
Sleep, my flower, my dear son. While I rock your cradle, I will tell you the story of your life. I will start by saying that you are a Hebrew, that your name is Israel, and that this is your title of nobility. Darling, when you are with those who do not know your people, do not be ashamed before their insults, but answer them aloud. I pray you, be fearless. Say, “Am I not descended from the holy ones, the son of the eternal people?”, the son of the eternally persecuted people, unhappy like no other but still glorious, for it has endured for centuries and will endure forever. Do not despair, my darling son, because your people is in exile. Rather, believe that the sun of justice will shine on us one day. Never forget that we have a country, very far away, and that calls out to the soul of all Jews. On its mountains, in its delicious fields, you will become whatever you want to be: vinedresser, shepherd, planter, gardener, you will live in peace… Sleep, my flower, my dear son.

 

Latil was also the source poet for La tourterelle (The Turtledove)

Ma colombe, ô ma tourterelle, est-ce vous dont j’entends la voix plaintive qui gémit dans les ramaux de ces ormaux qui s’assombrissent? Dans cette fin du jour l’air du soir était caressé par vos ailes, et maintenant, dans l’arbre balancé votre voix chante grave et pure, se mêlant au confus murmure des eaux. Ah! quelles tempêtes et quels orages vous ont emporté dans leur vaste univers mon bel oiseau si fier, conduisant votre course avec celle des grands nuages vagabonds. Qu’il est pure le ciel à son zenith! Se peut-il que les vents calmés vous aient abandonné dans les rameaux de ces grands arbres? Leur feuillage hautain est confus sur le firmament. Que vous vous plaignez tristement! Quelle flèche vous a blessé, mon bel oiseau si doux? C’est ici la vallée de mes larmes. Voici ces tendres coteaux, ces fleurs jamais cueillies, ces rives nébuleuses qui cheminent vers l’horizon. Le soleil a laissé ses rayons dans le ciel, dans un ciel pur où palpite le vol d’autres colombes invisibles. Vous chantez sur cette arbre au pied duquel je pleure. Ma colombe, ô ma tourterelle, demeurez avec moi, dans ma vallée.
My dove, my turtledove, is it your plaintive voice I hear moaning in the gathering shadows of the elm trees’ branches? Day is dying, and your wings caressed the evening air. Now, swaying in the tree, your pure, solemn singing is mingled with the murmur of the waters. What tempests and storms have borne you in their vast universe, my fine proud bird, hurrying you along with the wandering clouds? The highest heaven is so pure. Have the winds died down and abandoned you in the branches of these mighty trees? Their haughty leaves mingle with the firmament. Your song is so sad. What arrow has wounded you, sweet and beauteous bird? This is the valley of my tears. See these tender hillsides, these unpicked flowers, these uncertain banks leading toward the horizon. The sun has left its rays in the sky, a pure sky palpitating with the flight of other invisible doves. You sing in this tree; I weep at its roots. Oh my dove, my turtledove, stay with me in my valley.

 

Les Soirées de Pétrograde (Petrograd Evenings) were written to the text of René Calupt (1885-1957)

One: L’ancien Régime (The Old Régime): L’orgueilleuse (The Proud One)

Pourquoi, Princesse de Ballet, Refuses-tu ta bouche? Le coulisses du Châtelet Sont elles si farouches? Tu n’étais jadis à Moscou Que fille de cuisine, Les chauffeurs te baisaient au cou Qui sentaient la benzine.
Why, Princess of the Ballet, do you refuse to give your mouth? Is everyone so shy backstage at the Châtelet? In Moscow you were a kitchen maid and the chauffeurs kissed your benzine-scented neck.

 

Two: La Révoltée (The revolutionary)

Ma tourterelle, mon amie Suit des cours au Gymnase; Combinant acides et bases Elle apprend la chimie. Elle sera prostituée Et jettera des bombes Car le sang des reines tuées Est doux à ma colombe.
My turtledove, my girlfriend, takes courses at the Gymnasium. She combines acids and bases and learns chemistry. She will be a prostitute and throw bombs, for the blood of slain queens is sweet to my dove.

 

Three: La Martiale (The martial one)

Le grand Turc apprend ce qu’il cuit Aux Kurdes en déroute. Quand le jeune hetman les poursuit Par les gorges sans route. Mais son regard devient dément Lorsqu’aux hordes soumises Le vainqueur, changeant de chemise, Montre deux seins charmants.
The Great Turk finds out what troubles he’s causing for the fleeing Kurds when the young hetman pursues them through trackless canyons, but he goes mad when, the hordes in submission, the conqueror changes shirt and shows two charming breasts.

 

Four: L’Infidèle (The faithless one)

O Catherine Ivanowna, O ma douce colombe, Quitte ce vieux banquier qui n’a Déjà qu’odeur de tombe. On jase dans tout le district De nos mains désunies. Songe à mon coeur fidèle et strict, A sa peine infinie.
Oh, Catherine Ivanovna, my tender dove, leave this old banker who already smells of the grave. Everyone is talking about our breakup. Think of my faithful, constant heart and its infinite pain.

 

Five: Le Perverse (The perverse one)

Qu’elle était donc tentatrice Lors du bal au Palais d’Hiver La gorge de l’Ambassadrice Sous l’écharpe en tulle vert! Ce fut, à son gré, lécole Buissonnière en plus d’un cas Sous le manteau du Protocole Pendant quatre mazurkas.
How tempting the Ambassadress’ throat in its green tulle scarf during the ball at the Winter Palace. More than one skipped out, under the mantle of Protocol during four mazurkas.

 

Six: L’Irrésolue (The undecided)

N’écoute pas, Anastasie, Ce discours qui te trouble. Repousse ces colliers d’Asie Ces bagues et ces roubles. Le bras s’empourpre à l’aventure Aux champs de Volhynie Qui sera la rouge ceinture De tes hanches unies?
Anastasia, don’t listen to this speech which troubles you. Reject these Asian necklaces, rings and rubles. The arm grows crimson in the adventures of the field of Volhynie. Who will be the scarlet belt around your hips?

 

Seven: La Révolution: La Grand Mère de la Révolution (the Revolution): (The Grandmother of the Revolution)

Qu’un jour à la gare Alexandre, Rentrant de Sibérie, La foule la verrait descendre D’un sleeping-car fleuri, Eût-elle rêvé d’aventure Cet accueil amical Durant sa villégiature Aux bords du Baïkal?
That one day at the Alexander station, returning from Siberia, the crowd would see her get off of a flowered sleeping car – did she dream of this adventure and this friendly welcome in her resort on the shores of Lake Baikal?

 

Eight: Le journées d’Aout (August Days)

C’est vous qu’au Palais de Tauride, Fineste privilège, J’évoque par ce jour torride, Princesse de collège.

J’oublie Ouvriers et Soldats Pour vous, Iphigénie, Et la fraicheur de ce soda Me parait infinie.

It is of you in the Taurian Palace with your fatal privilege that I think on this hot day, adolescent princess.

I forget workers and soldiers for you, Iphigenia, and this soda feels infinitely cool.

 

Nine. Monsieur Protopopoff (Mr. Protopopoff)

Regardez ce Monsieur qui va Monter en limousine Et cause avec Viroubova Que l’on dit sa cousine. L’Esprit l’a comblé de ses dons Et parle en sa parole; Il enchante les guéridons Et charme les consoles.
Look at this gentleman getting into the limousine to chat with Viroubova, who is said to be his cousin. The Spirit has filled him with its gifts and speaks through him. Even the tables are charmed and enchanted.

 

Ten. Le Convive (The Guest)

Elles t’aiment plus que la vie; Tu les mettrais au désespoir Si tu ne venais pas ce soir Au souper où je te convie. Viens. Il y aura sous mon toit Les plus belles de tes compagnos, Des roses rouges du champagne Et une surprise pour toi.
They love you more than life. They would be in despair if you don’t come to the supper I’m inviting you to tonight. Come. Under my roof you will find the loveliest of your female friends, red roses of champagne and a surprise.

 

Eleven. La Limousine (The Limousine)

Sous la neige, la Rolls Royce S’arrête le long du quai. Ah! l’étrange, le lourd paquet Qu’ils cachent sous leurs pelisses!

Aux cent cloches de la Néva, Tandis que sonnent matines, Le très saint moine Raspoutine Docile au destin s’en va.

The Rolls Royce stops by the quay in the snow. What a strange and heavy package they are hiding under their pelisses!

While the hundred bells of the Neva sound matins, the very holy monk Rasputin leaves us, docile to his fate.

 

Twelve. Le Colonel Romanoff

Le soir vient; la bise têtue Dévaste les bouleaux; La voix des fontaines s’est tue A Tsarkoie Selo. Poursuivant son ombre qu’allonge Le couchant solennel, Erre dans le palais de songe Un pâle colonel.
It is evening. The cold wind worries the birches. The fountains are silent at Tsarskoje Selo. Chasing his shadow, lengthened by the setting sun, a pale colonel wanders through the dream palace.